Exportations de la Russie vers les pays des BRICS 2025 : Tendances clés, facteurs moteurs et perspectives
Le profil des exportations russes en 2025 continue de s’orienter résolument vers le bloc économique des BRICS — Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud — ainsi que vers les nouveaux membres Égypte, Éthiopie, Iran et Émirats arabes unis. Alors que les marchés occidentaux demeurent restreints par les sanctions et les contraintes de conformité, les partenaires des BRICS s’imposent désormais comme la principale voie de croissance pour la Russie. L’analyse suivante examine les données actuelles sur les exportations, les évolutions sectorielles et les prévisions à court terme qui façonnent cette réorientation commerciale.
1. Rééquilibrage des flux commerciaux
Selon les données douanières compilées par le Service fédéral des statistiques de Russie et ses agences partenaires, le volume total des échanges commerciaux entre la Russie et le groupe BRICS + a augmenté d’environ 6 à 7 % sur un an en 2024, posant ainsi les bases d’une nouvelle expansion en 2025. Le BRICS + représente désormais environ 27 % des exportations mondiales de marchandises, contre 24 % il y a cinq ans. Dans le commerce extérieur de la Russie, ce bloc constitue aujourd’hui plus d’un tiers des exportations totales, contre 19 % en 2018.
Ce pivot stratégique a été renforcé par un réajustement monétaire. Les règlements bilatéraux en monnaies nationales — principalement en yuan, roupie et dirham — ont remplacé les transactions libellées en dollars dans de nombreux contrats à long terme, réduisant ainsi la dépendance aux systèmes de paiement occidentaux. Les analystes estiment que ce changement structurel devrait perdurer, quelles que soient les évolutions politiques à venir.
2. Énergie : le cœur des exportations russes
Les produits énergétiques continuent de dominer le panier des exportations russes. Malgré la volatilité des prix, les revenus tirés des combustibles fossiles demeurent la principale source d’entrée de devises étrangères. Le Centre indépendant de recherche sur l’énergie et l’air pur (CREA) estime que les recettes russes provenant des exportations de combustibles fossiles ont atteint en moyenne 546 millions d’euros par jour en septembre 2025, soit une baisse de 4 % par rapport au mois précédent, mais un niveau toujours substantiel. [1]
L’Inde demeure le plus grand acheteur unique de pétrole brut russe transporté par voie maritime, s’approvisionnant à hauteur d’environ 34 % de ses importations totales auprès de fournisseurs russes en septembre 2025. [2] Bien que les importations totales de brut de l’Inde aient diminué de 10 % par rapport aux niveaux de 2024, la Russie a conservé sa position de leader grâce à des rabais compétitifs et à des conditions de livraison flexibles. La Chine reste un autre marché d’ancrage, absorbant environ 40 % des revenus russes issus des combustibles fossiles. Les infrastructures logistiques énergétiques — notamment l’oléoduc Sibérie orientale–océan Pacifique et les corridors maritimes arctiques — continuent d’augmenter leurs capacités.
3. Сельскохозяйственный экспорт: от продовольственной безопасности к рыночной стратегии
La diversification des exportations russes vers le secteur agricole s’est fortement accélérée. La campagne 2025/26 devrait établir de nouveaux records en matière d’expéditions de céréales et d’huiles végétales. Le ministère russe de l’Agriculture prévoit des exportations totales de blé comprises entre 43 et 44 millions de tonnes métriques, consolidant ainsi la position de la Russie en tant que premier fournisseur mondial de blé. [3]
Les exportations d’huile de tournesol sont estimées à près de 5 millions de tonnes, l’Inde représentant à elle seule environ un tiers des achats. L’Égypte et l’Iran étendent également leurs contrats dans le cadre de programmes bilatéraux de sécurité alimentaire. Le secteur des pêches et de l’aquaculture rejoint également cette dynamique : les exportations russes de produits de la mer vers les partenaires des BRICS ont augmenté de 50 % entre 2021 et 2024, atteignant une valeur d’environ 3,1 milliards de dollars US, selon les données de Tridge Market.
Ces flux s’inscrivent dans un objectif russe plus large : rééquilibrer la dépendance aux hydrocarbures en développant des exportations agricoles à forte valeur ajoutée, soutenues par un financement libellé en roubles ou en yuans.
4. Engrais et minéraux
Les exportations d’engrais illustrent l’interdépendance croissante de la Russie avec les marchés émergents. L’Association des producteurs d’engrais de Russie vise à porter la part de marché mondiale à 25 % d’ici 2030, contre environ 20 % actuellement. [4] Près de la moitié de la consommation mondiale d’engrais se concentre au sein des économies des BRICS — principalement l’Inde et la Chine — faisant du bloc une destination naturelle pour la Russie. En 2025, les exportations russes d’engrais azotés et potassiques vers l’Inde ont atteint des volumes records, malgré les défis logistiques et les contraintes de paiement.
Les produits métalliques et miniers suivent une tendance similaire. Les expéditions de nickel, d’aluminium et de cuivre vers la Chine et l’Inde ont en partie compensé la baisse de la demande européenne. Les régions minières de l’Oural et de la Sibérie sont désormais orientées vers les installations de transformation asiatiques et les projets d’expansion portuaire sur la côte pacifique.
5. Dynamiques bilatérales au sein du bloc
Brésil et Amérique latine
Les échanges commerciaux entre la Russie et le Brésil ont atteint environ 12,4 milliards de dollars US en 2024, dont près de 11 milliards de dollars d’exportations russes, portés par les engrais, les céréales et les produits chimiques. [5] Ce partenariat repose sur la forte demande agricole du Brésil en intrants potassiques et phosphatés. À l’avenir, les itinéraires logistiques via l’Atlantique et le corridor maritime du Nord pourraient réduire les délais de transit et améliorer l’efficacité du commerce bilatéral.
Le commerce entre la Russie et le Brésil a atteint environ 12,4 milliards de dollars US en 2024, dont environ 11 milliards de dollars d’exportations russes, portées par les engrais, les céréales et les produits chimiques. [5] Le partenariat repose sur la demande agricole du Brésil en intrants potassiques et phosphatés. Les routes logistiques via l’Atlantique et le corridor maritime du Nord pourraient réduire le temps de transit à l’avenir.
Le volume des échanges commerciaux entre l’Inde et la Russie a été multiplié par cinq entre 2021 et 2024. Au-delà du pétrole brut, les initiatives bilatérales englobent la construction navale, la fourniture de combustible nucléaire, ainsi que l’importation de produits pharmaceutiques de l’Inde vers la Russie. Les analystes s’attendent à ce que les règlements bilatéraux en roupies et en roubles se stabilisent d’ici mi-2026, une fois les contraintes initiales de liquidité résolues.
Chine
La Chine reste le plus grand partenaire commercial global de la Russie. Cependant, les statistiques douanières pour la période janvier – septembre 2025 montrent une baisse d’environ 9 % du chiffre d’affaires total, atteignant 163 milliards de dollars US, reflétant un affaiblissement de la demande industrielle chinoise et un ajustement des prix des matières premières. Malgré cela, les deux pays maintiennent une coordination stratégique dans les domaines de l’énergie et du développement des infrastructures, notamment avec le gazoduc « Force de Sibérie » et les projets conjoints dans l’Arctique.
Nouveaux membres du groupe BRICS+
L’Égypte et les Émirats arabes unis deviennent des pôles pour la réexportation des céréales et de l’énergie russes. Le port de Jebel Ali aux Émirats s’est transformé en centre de transbordement pour les produits russes destinés à l’Asie et à l’Afrique, tandis que l’Égypte négocie l’élargissement des accords de fourniture de blé et de pétrole liés à son agenda de sécurité alimentaire nationale. L’Iran et l’Éthiopie devraient se concentrer sur les intrants industriels et les équipements énergétiques dans le cadre de leurs plans commerciaux bilatéraux.
6. Corridors logistiques et financiers
Le développement de nouveaux corridors de transport et de financement est essentiel pour soutenir la croissance des exportations. Le corridor international de transport Nord–Sud (INSTC), reliant la Russie à l’Inde via l’Iran et la mer Caspienne, a réduit le temps de transit de 30 à 40 % par rapport aux routes passant par Suez. Dans le même temps, la Russie et la Chine testent le rouble numérique et des systèmes de règlement transfrontalier basés sur le CIPS afin de rationaliser les paiements. Ces connexions technologiques renforcent la résilience face aux sanctions financières et favorisent une accélération du dédouanement dans les ports des pays des BRICS.
7. Risques économiques et forces modératrices
Malgré des chiffres globaux solides, plusieurs risques pourraient freiner la dynamique des exportations russes :
- Volatilité des prix et exposition fiscale : La baisse des prix mondiaux du pétrole et l’ajustement des droits d’exportation affectent les recettes budgétaires.
- Contraintes de capacité d’expédition : Les conditions météorologiques et les incidents de sécurité dans les ports de la mer Noire (par exemple Novorossiïsk) continuent de perturber les flux commerciaux. [6]
- Problèmes de liquidité monétaire : La convertibilité limitée entre le rouble et les devises partenaires continue de poser des obstacles à court terme.
- Retard des infrastructures : Bien que de nouveaux corridors existent, la modernisation des ports et l’expansion des capacités ferroviaires restent inachevées.
Néanmoins, la trajectoire globale du commerce russe avec les pays des BRICS demeure positive. Les transformations structurelles des chaînes d’approvisionnement et des flux d’investissement ont peu de chances de s’inverser, même dans un scénario de croissance prudente.
8. Perspectives pour 2026 et au-delà
Les analystes prévoient que les exportations de la Russie vers les marchés des BRICS croîtront d’environ 4 à 6 % par an au cours des deux prochaines années. Le secteur de l’énergie restera dominant, mais sa part devrait se contracter progressivement au profit de l’agriculture et de la chimie. D’ici 2026, les importateurs des BRICS pourraient représenter la moitié des revenus d’exportation non énergétiques de la Russie, contre environ un tiers aujourd’hui.
Sur le plan macroéconomique, la stabilité du rouble face aux devises asiatiques, combinée aux projets d’intégration régionale, déterminera le degré de durabilité du pivot commercial russe. En parallèle, la coopération des BRICS en matière de normalisation et de numérisation douanière pourrait encore simplifier les flux commerciaux et réduire les coûts de transaction.
Conclusion
La réorientation des exportations russes vers le bloc des BRICS n’est plus une réaction d’urgence aux sanctions, mais une transition structurelle durable. L’énergie demeure le moteur financier, tandis que les céréales, les engrais et les métaux forment la base élargie du commerce russe. L’innovation logistique et la souveraineté financière au sein des BRICS devraient définir la prochaine phase de croissance. Pour les importateurs et analystes mondiaux, 2025 marque un tournant dans la manière dont la Russie s’intègre à l’ordre économique émergent du Sud global.

